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"on voudrait tuer la presse on ne s’y prendrait pas autrement": les journaux vont-ils manquer de papier?

Source: nicematin.com publié le 06 juin 2018

Les papetiers sont-ils en train de porter l’estocade finale aux journaux et imprimeurs?

D’après le quotidien belge Le Soir, entre fin 2017 et janvier 2018, le prix de la tonne de papier journal est passée de 450 à 500 euros. Soit une augmentation de 11 %.

En cause : une demande bien plus forte que l’offre proposée par les papetiers. Certains professionnels du secteur, souhaitant garder l’anonymat, n’hésitent pas à parler de "pénurie".

En 2016, Holmen, géant suédois du papier, vendait son usine madrilène de production de papier journal. Résultat : une réduction annuelle de la production européenne de près de 300.000 tonnes…

L’influence de la demande chinoise

Et le phénomène ne date pas d’hier. "C’est entre 2002 et 2003 que la production de papier graphique (utilisé notamment pour les magazines et les journaux, Ndlr) a commencé à diminuer", glisse Jan Le Moux, directeur économie circulaire et politique produits à la Copacel, l’Union française des Industries des cartons papiers et celluloses.

Le développement du numérique et la diminution des ventes de journaux papiers passent par là. "Au niveau européen, voir mondial, il y avait des surcapacités de production, poursuit Jan Le Moux. Des usines ont fermé, certaines n’ont pas survécu. Les sites se sont restructurés, notamment vers l’Allemagne et l’Europe de l’est."

Et la baisse de la production de papier pour la presse s’est poursuivie, jusqu’à aujourd’hui… Entre 2016 et 2017, "la production française de papier graphique est passée de 2,58 à 2,23 tonnes", détaille Jan Le Moux. Au niveau européen, "la production s’établissait à 33, 9 millions de tonnes en 2016, en diminuant de 3,8 % entre 2015 et 2016."

Soit une baisse d’1,3 million de tonnes sur un an. Les professionnels ont alors délaissé le papier pour le carton, beaucoup plus porteur avec le développement du e-commerce. "En 2016, les emballages représentaient 56 % de la production française, contre 28 % pour le papier graphique", compte Jan Le Moux. En 2002, d’après la Copacel, cette proportion était de 45 % - 44 %.

Parallèlement, un événement imprévu a fait irruption lors de l’été 2017. La Chine a en effet décidé de ne plus accepter les déchets de papier et de cartons mélangés en provenance du reste du monde, jugés trop polluants. Sans matière première à acheter, les fabricants chinois se sont alors tournés vers du papier journal "classique". Tirant alors la demande vers le haut.

Et visiblement au-delà de ses capacités…

Une nouvelle hausse dans l’année

Les industriels ont-ils alors trop délaissé le papier journal pour le carton? "Les ajustements réalisés ont peut-être été trop forts", estime Jan Le Moux, tout en assurant n’avoir jamais entendu parler de pénurie. Concernant les hausses du prix du papier journal, la fédération des professionnels assure qu’elle n’est pour ces derniers qu’une façon de "se reconstituer des marges".

Plusieurs journaux français sont pourtant touchés (lire ci-dessous), et la crise semble mondiale. En avril, c’est la presse sénégalaise qui n’a pas pu paraître pendant quelques jours, faute de papier.

Au Canada, des éditeurs sont en difficulté économique. La suite, elle, ne s’annonce pas rose. Une nouvelle hausse des prix est prévue dans l’année, tandis que la baisse de la production de papier journal, même moins forte en 2017, est jugée "continue".

"Pas d’impact sur le prix du journal"


Le groupe Nice-matin consomme 800 tonnes de papier par an. Cette pénurie mondiale - qui entraîne aussi une hausse du prix - aura un impact mécanique sur l’entreprise. Les explications de Jean-Marc Pastorino, président du directoire du groupe Nice-matin.

Quel sera l’impact?
-Une hausse de près de 20 % sur le premier poste de consommable qu’est le papier est forcément une mauvaise nouvelle. Mais le plus préoccupant, c’est la pénurie de papier car nous n’avons plus de stock.

Quelles seront les conséquences pour nos lecteurs?
-Il n’y aura pas d’augmentation du prix du journal. En revanche, nous allons devoir économiser le papier. Le journal de l’été, par exemple, va passer de 16 à 8 pages. Le magazine pour les abonnés est suspendu pour la période estivale. Nos projets de hors-série sont reportés. Je présente mes excuses à nos lecteurs pour ces inconvénients. Par ailleurs, nous allons veiller à limiter la gâche (Ndlr : exemplaires mal imprimés et jetés avant que la rotative soit parfaitement calée).

Toutes les gammes de papier sont touchées?
-Absolument. Tous les imprimeurs en subissent les conséquences.

Quelle est la situation des autres titres de la presse quotidienne en France?
-La situation est la même. Le groupe Ebra par exemple (Ndlr : Le Dauphiné, Le Journal de Saône-et-Loire, Le Progrès) a annoncé une très forte réduction de sa pagination. Je vais contacter d’autres patrons de presse pour étudier les mesures que nous pouvons mettre en œuvre.

Comment imaginez vous la sortie de la crise?
-C’est très compliqué d’imaginer aujourd’hui comment on va en sortir. Les usines ferment… Le marché du papier est totalement déstabilisé. Cette difficulté intervient au moment où la presse est terriblement impactée également par l’écotaxe. Franchement, on voudrait tuer la presse papier on ne s’y prendrait pas autrement.